Date: 16/09/2010
Serie De Conferences - Geneve Au Hall De L’Assemblée Générale Des Nations Unies Palais Des Nations Genève 16 Septembre 2010 Mr le Modérateur, Excellences, Distingués participants, Mesdames et Messieurs Permettez – moi, tout d’abord, d’exprimer ma sincère reconnaissance et mes remerciements au Sous-secrétaire général adjoint et au Directeur général du bureau des Nations unies, Mr Sergei A. ORDZHONIKZE et à Mr Carlos LOPES, Directeur exécutif de l’Office des Nations unies à Genève pour la formation et la recherche, pour m'avoir invité à participer à cette auguste édition. La série de conférences de Genève fournit une plate-forme unique de riches et stimulants discours sur de complexes et urgents défis mondiaux, dans le but de concevoir des approches constructives en vue de trouver des solutions dans un véritable esprit de multilatéralisme. Elle a été décrite à juste titre comme un point d’ancrage intellectuel pour les travaux de l’Organisation des Nations unies et un mécanisme pour canaliser la pensée et la recherche actuelles sur l’élaboration de politiques. Je me sens privilégié d'être un conférencier à cette cinquième édition aux côtés d’un aussi éminent écrivain de renommée mondiale qu’est Mr Carlos Fuentes. Le thème de notre débat concerne aujourd'hui le dialogue interculturel, les identités et les migrations. L'impératif de construire des ponts est lié au rapprochement culturel. Il est donc normal que nos délibérations s’inscrivent dans le cadre de l'Année internationale du rapprochement culturel observée en vertu de la résolution 90/62de l'AGNU. Je voudrais, dans cette présentation, aborder essentiellement cette question à multiples facettes, à la lumière de mon expérience et de mon rôle, en tant que Secrétaire général de l'OCI, qui, avec ses 57 Etats membres, a, au cours des quatre dernières décennies, évolué comme étant la deuxième plus grande organisation internationale après l'ONU. Nous sommes actuellement en train de mettre en œuvre un programme d'action décennal. Propulsé par la vision de «la modération et de la modernisation », le Programme a identifié des domaines d'action prioritaires. Il accorde la primauté au multilatéralisme, aux droits de l'homme et à la diplomatie culturelle comme éléments - clés de l'agenda de l'OCI. Chacune de ces questions est pertinente à notre discussion d'aujourd'hui. Je voudrais donc partager quelques réflexions qui seront suivies d’un débat animé dont l'esprit et l'intérêt seront –j’en suis convaincu- à la hauteur de ce prestigieux forum. Chers participants, Le vieil adage «nul homme n'est une île» est vrai aujourd'hui, comme il l’était hier. Chaque être humain possède certains attributs fondamentaux d'identité: un nom, une filiation et un milieu familial ainsi qu'une association culturelle et religieuse. Malgré les différences physiques, culturelles et ethniques des personnes de divers horizons géographiques et culturels, notre chimie de survie est la même tel que déterminée par la nature. La caractéristique unique de l'homme est qu'il ne peut vivre dans l'isolement. Il est inhérent à chacun d'entre nous de rechercher et de développer des relations avec nos semblables. Ce processus a conduit à la formation des institutions de la famille, des tribus, des sociétés, villages, villes et États. L’indomptable aspiration de l'homme à aller au-delà des frontières de son propre environnement et d'atteindre un monde plus vaste a résisté à l'épreuve du temps. Les migrations de personnes à travers les terres - qu'elles soient mues par les guerres, les catastrophes naturelles, les contraintes économiques, ou tout simplement par l'envie de passer à une autre civilisation - ont contribué à un brassage des cultures et des civilisations. Cette diversité des cultures, des civilisations et des croyances a enrichi l'existence humaine, car nous nous sommes embrassés, nous avons partagé et nous avons appris et profité les uns des autres. Cela est particulièrement vrai dans le façonnement de notre monde actuel de la diversité. les migrations n’ont, toutefois, jamais été un processus simple. Les migrants ont dû s'adapter à un nouveau mode de vie qui leur était étrange et peu familier. La patience des sociétés d’accueil a été également mise à l’épreuve dans l'acceptation de gens différents. Le défi pour les deux a toujours été d'interagir et de se réconcilier. Ce défi a toujours été difficile, mais a pu être relevé là où la qualité intrinsèque de serviabilité de l'homme a eu raison des contraintes à travers le dialogue, la compréhension et l'appréciation de l'autre. Alors qu'il incombait aux migrants de s'intégrer à leur nouvel environnement, on ne pouvait s'attendre d’eux à ce qu’ils se dépouillent de leur identité culturelle et religieuse car cette dernière est essentielle pour l'être humain. Elle constitue un élément important de la personnalité et de l'estime de soi. Elle donne à tous un ancrage important, des racines et un sentiment d’appartenance. L’identité permet de définir le présent et d’envisager l'avenir. L'appartenance à une culture et à une civilisation apporte à l'individu la confiance en soi dans la société composée de personnes aux goûts et mentalités différents. C'est à partir de cette source que la plupart des nobles valeurs de l'homme ont surgi à travers les âges. Chaque société vénère son patrimoine tout en respectant celui des autres. C'est de cette manière que la coexistence pacifique est assurée, la diversité culturelle sauvegardée et l'interaction de l'homme promue. Des valeurs partagées de l'homme ont évolué au fil des siècles. Celles-ci ont subi un long processus de raffinement pour former les valeurs universelles d’aujourd’hui consacrées dans le droit international, le droit international humanitaire et une myriade de traités, pactes et conventions. Au premier rang de ces valeurs se trouvent la diversité culturelle et la tolérance. Excellences, Chers participants, Toute discussion sur les questions liées de la migration, de l'identité et de la nécessité du dialogue interculturel doit être mise dans son contexte en cette ère de mondialisation - qui constitue la caractéristique déterminante de notre époque. La mondialisation pourrait avoir été une idéologie pleine de promesse. Cependant, la manière dont elle s’est, jusqu'à présent, déroulée est considérée - au moins dans les pays en développement dont fait partie la plupart des États membres de l'OCI – comme un démenti aux attentes des idéologues. Le puissant moteur de la mondialisation a provoqué un raz-de- marée de la migration. Il y a lieu de réfléchir au fait que la plupart des migrations qui ont lieu dans notre monde d'aujourd'hui sont de nature économique et induites par l'interconnexion de notre temps. La trajectoire asymétrique que la mondialisation a suivi au cours des deux dernières décennies a subi des déséquilibres monétaires, financiers et commerciaux internationaux profondément ancrés. La plus grande partie des migrations des temps modernes est attribuable à ces déséquilibres. Il serait donc important d'analyser ce qui a été décrit comme «l'âge de la mobilité» dans ce cadre et de relever le vaste faisceau de ramifications qui en découle. Pour être plus précis, la tendance de la migration de l'homme d'aujourd'hui est – principalement - du monde en développement vers les pays les plus riches de l'Occident. Plusieurs gouvernements occidentaux ont accueilli les migrants qui ont prouvé qu’ils sont des contributeurs à l’économie digne de confiance et d'autres considérations du pays d'accueil. Ces derniers temps cependant, nous constatons avec inquiétude une aversion croissante pour les migrants et les immigrants. Les populations migrantes sont victimes dans plusieurs pays du monde de discrimination et du déni de plusieurs de leurs droits fondamentaux, y compris les droits culturels. Je dois dire avec un sentiment de regret que le poids de cette discrimination est ressenti par les musulmans en Europe et dans d'autres sociétés occidentales. Excellences, Chers participants, Puisque nous parlons de cette importante question à Genève, capitale du multilatéralisme située au centre de l'Europe, je voudrais focaliser ma communication sur la situation des migrants musulmans vers le continent européen. C’est en fait la situation la plus compliquée de par ses aspects économiques, politiques, sociaux et culturels. Elle peut être comprise comme réunissant toutes les complexités précitées, mais ne peut en aucun cas être classée comme un nouveau développement. L'avènement des musulmans en Europe peut faire remonter au huitième siècle. L'histoire vous dira que l'islam était indigène en Europe pendant de longs siècles. En Espagne, depuis le VIIIème siècle, les juifs et les chrétiens ont constaté que la rencontre avec l'Islam leur a donné un nouvel aperçu de leurs propres traditions religieuses. L'avènement de l'Islam en Europe a fait émerger des savants musulmans qui ont été des pionniers dans diverses disciplines scientifiques. Leurs connaissances, leurs inventions, leurs découvertes et leurs travaux universitaires ont contribué à la modernisation de l'Europe. De l'Espagne à la Turquie, ils ont contribué en écrivant des livres dans les domaines des arts, des sciences et de la culture. Il y a lieu de souligner que la plupart de ces éclairantes contributions ont été faites pendant l’époque appelée l’âge des ténèbres de l’histoire européenne. En conséquence, il y a lieu de souligner que les migrations des musulmans au cours de l’histoire et leur installation ultérieure en Europe ont contribué positivement au développement l'identité européenne telle qu’elle est aujourd'hui. Pendant huit siècles de présence musulmane en Andalousie, les traditions islamiques ont produit un mélange unique de religiosité et d'une culture de tolérance et de liberté académique inconnue du reste de l'Europe à cette époque - là. Ce fait a contribué à propulser l'Europe sur la voie de l'humanisme et de la Renaissance. Cet idéal de la tolérance andalouse n'a, malheureusement, survécu à travers l'histoire européenne, que dans certaines parties de ce continent et particulièrement dans les Balkans sous les Ottomans. L’Islam a été autochtone de l’Europe du Sud pendant six siècles de traditions profondément enracinées et d’agréables souvenirs. La population musulmane en Europe est très diversifiée avec des histoires et des origines variées. Aujourd'hui, les régions à majorité musulmane de l'Europe sont l'Albanie, le Kosovo, la Bosnie-Herzégovine, ainsi que certaines régions de la Russie : le Nord du Caucase et la Volga. La tradition musulmane des Européens autochtones remonte à plusieurs siècles. La population musulmane en Europe occidentale est composée essentiellement de migrants qui sont arrivés sur le continent européen à travers le monde musulman pendant ou après les années 1950. Permettez-moi d'attirer l'attention sur quelques statistiques importantes. Le Haut-commissaire pour les réfugiés estime, en ce qui concerne le peuple albanais, que la proportion des musulmans est entre 39% à 70% en Albanie, 91% au Kosovo et 99% en Macédoine. La Bosnie a une pluralité musulmane. La Turquie compte 99 % de musulmans, l’Azerbaïdjan 93% et le Kazakhstan 57%. Les musulmans forment aussi environ un cinquième de la population du Monténégro. Les musulmans en Europe occidentale se sont installés, dans une large mesure, dans les zones urbaines. La proportion de la population musulmane dans certaines villes européennes s’est élevée à : 25% à Rotterdam (Pays-Bas), 24% à Amsterdam (Pays-Bas), 20% à Marseille (France), 17% à Bruxelles (Belgique), 16% à Bradford (Royaume-Uni), tandis que dans d'autres villes importantes comme Paris, Londres et Copenhague, cette proportion est de 10%. Certaines estimations prévoient que la population musulmane d'Europe sera doublée d'ici à 2020. 85% de croissance de la population totale de l'Europe en 2005 était due dans son ensemble à l'immigration. La population musulmane de l'Europe en 2009 a été estimée à un peu plus de 38 millions de personnes, soit 5,2% de la population totale de l'Europe. Malheureusement, les musulmans d'Europe et d'autres parties du monde occidental sont devenus suspects en raison d'une campagne distillée par un certain nombre d'individus motivés et des groupes qui semblent rongés par une rancune incompréhensible contre les musulmans et l'Islam. La population musulmane de l'Europe - qui, pendant des siècles, a vécu en paix et en harmonie avec les autres communautés - est aujourd'hui considérée comme étrangère. Ces musulmans subissent la pression pour les amener à délaisser certaines de leurs traditions et pratiques, au motif qu’elles ne seraient pas compatibles avec les us et coutumes locaux ; ce qui a entrainé une division croissante. L’actuelle tension dans les relations entre l'Islam et l'Occident porte le risque de transformer la notion de choc des civilisations en une prophétie auto-réalisatrice. L'islamophobie et la discrimination contre les musulmans en Occident semblent avoir pour cause l'apparence physique différente des musulmans et l'intolérance envers leur religion et leurs croyances culturelles. Je ne vois pas, en particulier avec l'arrière-plan historique ci-dessus, les raisons pour lesquelles la migration des musulmans en Europe et ailleurs en Occident devrait-elle être considérée et présentée comme une menace aujourd'hui. Pourquoi ces musulmans devraient-ils être pris pour des étrangers? Pourquoi faut-il que les symboles de leur identité soient dénigrés? Pourquoi les expressions de leur identité devraient-elles être interdites? C’est là une situation regrettable qui défie l’identité des migrants musulmans. C’est également un défi aux principales caractéristiques de l'identité européenne, y compris la tolérance, la non-discrimination et le respect des droits de l'homme. Surtout, cette situation fait planer une menace évidente sur la paix, la sécurité et la stabilité dans la région et dans le monde. Excellences, Mesdames et Messieurs, L'erreur la plus flagrante, qui est entrain d’être commise dans le sillage de la situation sur laquelle j'ai attiré votre attention, c'est qu'au lieu de trouver un terrain d'entente, soulignant les valeurs communes et le partage d'expériences, les identités sont plutôt promues et protégées sur la base des différences. C'est en effet l'antithèse -même de l'essence et de la logique de la mondialisation. Il est indispensable, en cette ère de mondialisation, que les questions de diversité culturelle et religieuse soient comprises et acceptées comme une réalité du nouveau monde. Cela devrait être considéré comme un puissant instrument de rapprochement entre les pays et les cultures, en vue de parvenir à un consensus sur l'ensemble des valeurs nécessaires pour soutenir la société globale. Le dialogue interreligieux doit donc tendre vers la «mondialisation éthique» dans laquelle toutes les cultures doivent pouvoir conserver leur intégrité tout en contribuant à la création d'une humanité considérée comme une grande famille ou règne la coexistence dans le respect mutuel. Excellences, Mesdames et Messieurs, L'islamophobie constitue une forme contemporaine de racisme. Permettez-moi de le dire clairement. Elle évoque la mauvaise gestion économique et une politique dangereuse. La tendance actuelle de la discrimination - observée et documentée en ce qui concerne la migration et l'intégration des musulmans en Europe - est pour le moins inquiétante. Il en est de même de ses implications : elle viole - non pas un ou deux droits – mais l’ensemble des droits de l’homme. Dans un développement plus dangereux, l'islamophobie est utilisée comme un instrument de la politique électorale. Cette tendance doit être stoppée en priorité au risque de donner lieu à une concurrence centrifuge dans le monde multiculturel auquel nous aspirons tous. C'est dans une tentative de faire face à cette situation que j'ai appelé à une réconciliation historique entre l'Islam et le Christianisme comme ça été le cas avec succès entre le Christianisme et le Judaïsme dans les années 1960. Il est grand temps de faire de même entre l'Islam et le Christianisme. Ce que je propose n'est pas un exercice théologique, mais je vise plutôt à susciter un climat de concorde, de compréhension, de respect mutuel et un sens de vivre ensemble en harmonie et en paix. Excellences, Chers participants, Les questions de grande importance ayant trait à la migration dans le monde actuel ne peuvent être prises à la légère. Ce sont des questions graves qui nécessitent un examen sérieux, d’autant plus qu’elles portent en elles le potentiel de boule de neige dans les crises majeures pour la communauté internationale. En fait, je crois que, parmi les plus graves menaces à la paix et à la sécurité figure aujourd’hui la montée de la haine et de l'intolérance envers la diversité religieuse et culturelle. Comme l’a dit l'ancien ministre britannique pour l’Europe, Denis MacShane, dans l’article qu’il a publié dans le « Magazine Newsweek du 26 avril 2010, "... .... Une nouvelle politique d'intolérance se prépare en Europe et personne ne sait comment y faire face". Je voudrais prêter attention à l'avertissement de M. Mc Shane. La montée en popularité des partis de droite en Europe et leur aversion inexplicable à l’égard de l'islam et des musulmans semble gagner en popularité dans la motivation des gens ordinaires contre les migrants et immigrés musulmans. Cela nous rappelle les migrants juifs aux États-Unis dans les années 50 et 60 quand beaucoup avaient été forcés d'abandonner leur identité d'origine et d'adopter des noms anglo-saxons pour échapper à l'antisémitisme ambiant. Je crains qu’avec la montée de l’islamophobie, les musulmans ne se retrouvent dans la même situation. Les résultats du référendum suisse du 29 novembre 2009, interdisant la construction de minarets dans les mosquées dans ce pays, a conduit à la constitutionnalisation et à la légitimation de l’islamophobie. Un article récent publié dans un journal suisse par le Parti du Peuple (l'UDC), le mois dernier, appelant des immigrés en Suisse à s'engager par écrit à s'intégrer dans la société suisse en abandonnant beaucoup de leurs valeurs culturelles et de leurs pratiques religieuses, conforte mon argument et justifie ma crainte. Il est encourageant de noter que ces préoccupations sont partagées par d'importantes institutions européennes. Je voudrais évoquer trois paragraphes de la résolution n ° 1743 adoptée récemment sur cette question par l'Assemblée parlementaire du Conseil de l'Europe, le 23 Juin 2010: Le paragraphe 9 stipule : « L’Assemblée appelle les Etats membres à lutter efficacement contre l’exclusion sociale et économique des musulmans et des autres minorités en Europe pour les protéger contre la discrimination qu’ils subissent au quotidien, et pour leur assurer un meilleur accès aux recours juridiques en cas de violation de leurs droits. Le paragraphe 12 stipule: «: «L’Assemblée déplore qu’un nombre croissant de partis politiques en Europe exploite et attise la peur de l’islam en menant des campagnes politiques qui privilégient des clichés négatifs à propos des musulmans d’Europe en assimilant souvent l’islam à l’extrémisme. L’incitation à l’intolérance et parfois même à la haine envers les musulmans est inadmissible. » Le paragraphe 13 stipule: « L’Assemblée reste également préoccupée par les politiques et les pratiques discriminatoires – tant des autorités nationales que des autorités régionales ou locales – à l’encontre des musulmans, et par le risque d’une utilisation abusive des votes, initiatives et référendums populaires pour légitimer des restrictions des droits à la liberté de religion et d’expression qui sont inacceptables au regard des articles 9 et 10 de la Convention. Dans ce contexte, l’Assemblée est particulièrement préoccupée par le référendum organisé récemment en Suisse et demande instamment aux autorités suisses d’adopter un moratoire sur l’interdiction générale de la construction des minarets de mosquées et d’abroger dès que possible cette interdiction. » Permettez-moi d'ajouter toutefois que nous ne pouvons pas nous permettre de baisser les bras, en signe de désespoir et de découragement, et laisser la voie libre aux adversaires de la diversité culturelle et de l’entente intercommunautaire. Nous ne pouvons pas détourner les yeux des droits des migrants et des immigrants et les laisser se faire dépouiller de leur identité individuelle et culturelle. Ils sont des êtres humains et doivent être traités de façon humaine. Les dispositions de la Convention internationale sur les droits de tous les travailleurs migrants et des membres de leur famille adoptée par l'Assemblée générale dans sa résolution 45/158 du 18 Décembre 1990, la Convention européenne sur le statut juridique des travailleurs migrants de 1977, la Déclaration de l'ASEAN sur la protection et la promotion des droits des travailleurs migrants de 2007 et d'autres instruments internationaux, qui respectent l'aspect humain des migrants et la protection de leurs droits fondamentaux et de leurs identités culturelles, doivent être respectés et observés par tous les intervenants. Chers participants, En tant que Secrétaire général de l'OCI, j'ai persisté dans mes tentatives de construire des ponts en défendant et en promouvant le dialogue interculturel. Nous avons fait valoir notre point de vue à l'Organisation des Nations Unies, à l'Alliance des civilisations des Nations unies, au Conseil de l'Europe, à l'OSCE et auprès d'autres institutions. Je pense fermement que toutes les parties prenantes doivent se réunir pour construire une culture de tolérance et de compréhension. Dans les entretiens et les interactions avec les chefs de gouvernement, j'ai souligné que le dialogue et l’entente interculturels doivent se faire à la base. Mon appel à une réconciliation historique entre l'Islam et le Christianisme que j'ai mentionné plus tôt peut être un moyen efficace pour réaliser une culture de la tolérance religieuse et la compréhension. L'OCI est en train de préparer l'organisation d’une conférence sur ce thème au début de l’année prochaine et nous serons heureux de voir une participation effective à cette conférence. Je voudrais terminer mon exposé sur ce point pour vous permettre un échange de points de vue. Mais avant cela, je voudrais inviter cette assemblée à envisager sérieusement deux questions: Y- a- t-il une alternative à un monde de diversité interculturelle? Sommes-nous prêts à laisser à nos générations futures un monde de turbulences et de haine en ne prenant pas le soin de développer une culture de paix et d'harmonie intercommunautaires? Je ne le crois pas. La question pour la discussion de laquelle nous nous sommes réunis ici aujourd’hui est enracinée dans le passé, nous confronte au présent et est inextricablement liée à notre avenir commun. Elle souligne l'importance de construire des ponts. Nous devons, cependant, aller au-delà de l’expression de bonnes intentions et des appels en fonction des événements vers le dialogue interculturel, en mettant l'accent sur la diplomatie culturelle. La priorité doit être accordée au multilatéralisme dans cette entreprise. L'importance de la création et du maintien des espaces à l’instar de ce forum n’est plus à démontrer. Autrement, nous laisserions un vide dans notre agenda à la merci des radicaux qui ne se feraient pas prier pour le prendre en otage. Dans la perspective de la société de la connaissance dans le village mondial, nous avons besoin d’évoluer vers un nouveau contrat social. Je voudrais proposer, entre autres chapitres de ce contrat, la bonne gouvernance de la mondialisation; un engagement soutenu et constructif axé sur toutes les questions, y compris les migrations, le multiculturalisme et le développement des normes visant à assurer le respect des droits de l'homme de tous sans discrimination aucune. Comme deuxième plus grande organisation internationale après l'Organisation des Nations Unies, l'OCI, avec ses 57 États membres, est prête et disposée à constituer un partenaire crédible dans cette entreprise, avec un esprit ouvert et positif. Je vous remercie tous pour votre patience.